Modélisation de l’analyse des besoins langagiers pour l’enseignement-apprentissage du français sur objectif universitaire

Le Français sur objectif universitaire a émergé grâce notamment à l’augmentation des effectifs d’étudiants allophones dans les universités francophones (Mangiante et Parpette, 2011 : 5). Ces auteurs constatent une « prise en compte limitée des besoins fondamentaux de ces étudiants » (ibid. : 6) et proposent d’effectuer une « analyse précise des besoins avérés » de ce public (ibid. : 41).

L’opération d’identification de ces besoins s’effectue au moyen d’enquêtes par questionnaires, entretiens et observations. Or, le risque lié à ces techniques est la projection des propres stratégies d’apprentissage du chercheur sur celles de l’apprenant. Cette analyse serait donc biaisée, les besoins ainsi repérés ne permettraient pas de répondre aux attentes de cet apprenant, ce qu’affirmait déjà René Richterich il y a plus de trente ans.

La présente communication, qui s’inscrit dans le cadre d’une recherche doctorale en cours, propose une réflexion méthodologique sur l’analyse des besoins langagiers auprès d’étudiants de médecine, dont le français n’est ni la langue maternelle ni la langue de scolarisation. Nous proposons de mettre en place sur le terrain, à la rentrée prochaine, un dispositif pédagogique et de recherche innovant basé à la fois sur la classe inversée et sur la variation de la perception des besoins langagiers des étudiants selon la méthode de triangulation des sources (Lancereau-Forster, 2017) : étudiants, enseignants de spécialité et enseignant de français. Concernant l’analyse des besoins ressentis des apprenants, ces derniers seront invités à recueillir dans un journal de bord l’expression de leurs attentes, et d’y noter la progression de leur apprentissage.

Ce journal, en facilitant l’identification des compétences à développer, permettrait à l’enseignant de langue d’atteindre l’efficience pédagogique. L’efficacité didactique peut être mesurée par le degré d’atteinte des objectifs d’apprentissage (Cuq (dir.), 2004 : 80). Par ailleurs, l’apprenant ne percevrait l’utilité (ou nécessité) d’un appui linguistique que si cet appui répond à la fois aux compétences nécessaires pour la compréhension du cours de spécialité et à une certaine progression dans le développement de ses compétences linguistiques.

Enfin, le journal de bord est aussi lié à la question de l’évaluation : « en évaluation formative, [l’évaluation authentique] mène à des bilans individuels et à l’élaboration de dossier d’apprentissage (portfolios) personnalisés, […]. » (Cuq (dir.), 2003 : 92). En effet, portfolio et journal de bord mettent en œuvre chez les apprenants les mêmes types de processus cognitifs d’auto-observation et d’introspection (Martinez, 1994 : 54, dans Cadet, 2007 : 181).